En ces années 20 où l'internet a totalement raboté les demi-mesures, où tout est blanc ou noir, "un chef-d'œuvre" ou "la pire chose que j'ai vue de ma vie", il est très difficile de parler d'un film comme Dune - Partie 2 sans tomber dans les acclamations du stade. Il y a ceux qui l'ont loué, ceux qui l'ont critiqué, mais comme jamais auparavant dans ce cas, la réalité se situe quelque part entre les deux. Malheureusement, je dois ajouter.
J'ai beaucoup aimé le premier chapitre, même la rigueur martiale avec laquelle Denis Villeneuve a choisi de mettre en scène une histoire qui, dans la version de Frank Herbert et la célèbre adaptation de David Lynch, comportait beaucoup de drogues et de solutions visionnaires et démesurées. Villeneuve, au contraire, aime l'austérité, et il l'a confirmé avec Dune, en forgeant une histoire sévère et rigoureuse de surpuissance, d'intrigue de palais, de prédestination et de survie dans un monde dur et hostile. Il a eu l'avantage, par rapport à Lynch, de pouvoir scinder un roman très dense (à la Tolkien) en deux parties, afin de mieux en explorer les aspects les plus complexes.
Je dirais que c'est peut-être la meilleure définition d'une œuvre qui est une bonne adaptation, formellement "correcte", qui coupe ce qu'il faut pour rationaliser l'histoire, qui sait faire ressortir les thèmes principaux du roman, qui touche à toutes les étapes du cinéma fantastique et qui amène le résultat sans jamais ennuyer tout au long de ses 166 minutes. Pas pour tout le monde.
Alors, dans l'arène du web de 2024, je me dois de faire immédiatement une mise au point à l'intention de ceux qui aiment applaudir : Dune - Deuxième partie est un bon film, mais il y a des films qui ont ce petit quelque chose en plus qui en fait des pierres angulaires de la culture populaire, des " films cultes " qui restent gravés dans la conscience collective : hélas, je crains que Dune 2 n'en fasse pas partie.
En tout cas, si vous ne l'avez pas encore vu, allez au cinéma pour profiter de la musique à plein régime.
Quel est le problème ? D'une part, je pense que c'est le fait qu'avec cette deuxième partie du roman, Denis Villeneuve a atteint une limite naturelle : son style essentiel ne s'accorde pas avec le crescendo lysergique et visionnaire : Paul Atreides commence à avoir des visions d'un futur dans lequel la galaxie entière subira des châtiments innommables à cause de ses actions. Ainsi, la rigueur de Villeneuve se retourne contre lui et sape les moments où il aurait été opportun d'approfondir et de mieux rendre le concept de la dangerosité du culte construit par le Bene Gesserit autour de la figure du messie Paul Muad'dib.
Car c'est finalement le thème central de Dune, n'est-ce pas ? Le pouvoir absolu corrompt absolument, et même celui que nous percevons comme le héros n'est en réalité qu'un énième dictateur tombé d'en haut, dans un éternel cercle vicieux où ce sont toujours les pauvres qui souffrent.
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